mardi 29 mai 2012

JOYCE JOHNSON / Personnages secondaires.

 
Tout commence par une photographie,  trop connue, trop reproduite, de quatre garçons jeunes, décontractés, "cools",  devenus les emblèmes d'une génération en noir et blanc... Hors champ, d'autres jeunes gens, mais surtout les "minor characters" de cette légendaire aventure, quelques jeunes femmes courageuses, en rupture avec leur héritage familial, social, culturel tout autant que ces hommes auxquels elles allaient consacrer temps, énergie, attention- pour leur perte parfois. 

(Il y a quelques jours, un tour dans une grande librairie parisienne: tables croulant sous les écrits de Kerouac; aucune réédition disponible des deux livres dont je parle ici...)

 Là où Carolyn Cassady, dans un fort beau texte,  faisait part de son immense masochisme, de sa détresse, à la mesure de la passion qui l'avait portée vers Neal Cassady ainsi que de la manière dont elle s'était accommodée, au fil des années, de la répétition des trahisons, des repentirs, des mensonges.... Là où elle reconstruisait par l'écriture une vie dont elle aurait pu être désespérée si l'on considère le prix payé pour ses moments d'exaltation et d'ivresse, là n'est pas la démarche ni le propos de Joyce Johnson, qui a  su rompre avec cette logique de l'attente, languide et passive, qui séduisait tant - et irritait tout autant- les deux comparses que furent Neal Cassady et Jack Kerouac.
A la lire on mesure notre méconnaissance de ce pan de la Beat Generation dont les seuls membres actifs littérairement reconnus ont été des hommes, choyés et soutenus par leurs compagnes, leurs petites amies... Génération battue de l'après guerre, celle des hipsters, de la contre culture; génération "béatifique" si l'on en croit Kerouac, avide d'enchantements artificiels et érotiques,  de dérèglements linguistiques et sensuels, sexuels, à la recherche "des filles, des visions, tout; quelque part sur le chemin".

"Nous n'avions pas prévu d'être des rebelles autonomes; nous n'envisagions pas la solitude. Dès que nous avions trouvé notre homologue masculin, nous avions une foi trop aveugle pour remettre en question les rapports traditionnels entre les sexes. (...) des femmes de transition, (...) qui entamaient le long travail, toujours inachevé, de transformation des rapports avec les hommes."

Adolescente de treize ans et demi, Joyce Glassman vit, dans la 116ème rue à NY,  à deux pas de Joan Vollmer Burroughs, de Jack Kerouac et d'Allen Ginsberg,  sous la cloche de verre de l'amour maternel ( "Elle désire seulement me protéger de tout") qui, comme pour d'autres à la même époque, ressemble fort à une "cloche de détresse". Tenue à l'écart de ses émotions, de ses désirs, elle s'y cogne de plus belle, devenant une spécialiste de la dissimulation et de "l'invisibilité, solution bancale au conflit intérieur/ extérieur", devinant un ailleurs à portée de main (Ce sera Whashingon Square et pas vraiment la version Henry James!).

"Tout cela semblait promettre une chose à laquelle je n'avais jamais goûté au cours de mon enfance- et pour moi cette chose se nommait la Vie Réelle. Ce n'était pas la vie que menaient mes parents, mais une existence dramatique, imprévisible et peut-être dangereuse. Par conséquent réelle, infiniment plus désirable." 
Rigueur familiale, déchirements, dont les traces seront profondes:
"J'ai le sentiment de tout manquer (...) A six heures un quart, je me prépare à partir pour affronter une semaine aussi lugubre que al précédente. Au fil des secondes et des minutes, une angoisse mêlée d'un désir décuplé me submerge et me plonge dans un étrange état. Je ressens la même chose, les années suivantes, chaque fois que je dois me séparer de l'homme que j'aime. Je n'appréhende pas tant de le quitter que la dissolution imminente de mon identité."

Quelques années plus tard, à Barnard College, Joyce fait la rencontre "d'une fille que mon instinct me dit immédiatement d'éviter." Elise Cowen,éternelle amoureuse sans retour, consumée de passion pour Allen Ginsberg. Un soir de février 62, après les thérapies, les internements, les errances, au terme d'une tragique partition, elle se défenestre. Elle a vingt-sept ans. Quelques poèmes, sauvés par un ami -alors que sa famille a brûlé ses journaux, ses lettres- ,bouleversants, ont subsisté, frêle témoignage d'un échec, d'une éclipse prématurée. De son côté, des années plus tard, Ginsberg écrivit avec Lucien Carr un texte "hommage" à celle qu'il surnomme d'ailleurs "Ellipse", sans qu'il soit possible de discerner lequel des deux s'exprime...
Tout au long de son aventure amoureuse avec Jack Kerouac, Joyce Johnson, qui tente de devenir écrivain, éprouve l'insécurité, l'abandon et le mensonge - toutes attitudes ou pratiques en vigueur chez les écrivains beat. Son indépendance, elle la paie de sa pauvreté, de sa rupture avec sa famille, de l'opprobre sociale, professionnelle...Pas grave, Joyce construit à tâtons sa route vers un devenir incertain, vers l'écriture, l'émancipation, si timide soit-elle.
Sur cette trajectoire, la plupart des personnages féminins se noient longtemps dans une indétermination incommode. Les poètes beat semblent à rebours du jaillissement à l'oeuvre dans leur écriture: archaïques. Excès sensuels, langagiers vont de pair avec le refus de réviser les codes, et s'ils érigent des piédestals à la gloire de la Femme Chtonienne ou à celle de figures sororales, ils ne conservent, pour certains d'entre eux de sentiments passionnés et définitifs qu'avec... leur mère, Mémère pour Kerouac; Naomie la folle, pour Ginsberg.

Les femmes de la constellation Beat, elles, apprennent, souvent dans la douleur, à se défaire de leurs attentes concernant un idéal masculin traditionnel: "Je trouvais malgré tout déconcertant d'être laissée aussi libre. Les hommes étaient censés demander, prendre, ne jamais vous laisser en paix. Je désirais être désirée." Plus loin Joyce Johnson évoque " cette distance déconcertante, à la fois paternelle et insécurisante" maintenue par Kerouac dont l'autoportrait déguisé dans Les Souterrains est rien moins que troublant:" un homme qui manque de confiance en soi, en même temps un égocentrique..."

Partager, être en concurrence, toujours sur le fil- pas vraiment idéal pour gagner en assurance et se constituer soi-même comme sujet créateur...

Heureusement l'amitié, la profonde compréhension et la générosité de quelques unes de ces femmes artistes passera les épreuves du temps... Deux beaux portraits, rapides, rendent hommage à deux de ces femmes d'exception, Hettie Jones, pourfendeuse des préjugés raciaux, mariée au poète noir Leroy Jones; Mary Frank,épouse du photographe, sans endroit à elle pour mener à bien son travail de sculptrice, toujours distraite "de son désir, aussi fort que chez un homme, de devenir une artiste" par les amis de passage, les repas à préparer, les enfants- lignes poignantes lorsqu'on sait ce qu'il advint d'eux.



 "...Devais-je à ma propre folie d'être restée fidèle à ces années où la porte s'ouvrit pour la première fois sur un monde que je ne réussis jamais à explorer aussi à fond que je le souhaitais?
Je revois Joyce Glassman, jeune fille de vingt-deux ans, ses cheveux tombant sur les épaules, tout de noir vêtue, comme Macha dans la Mouette - bas noirs, jupe noire, pull-over noir- mais, contrairement à Macha, elle n'est pas en deuil de sa vie. Comment aurait-elle pu l'être, assise au centre exact de l'univers, en ce lieu nocturne où tout converge, seul endroit vivant d'Amérique? Son sexe lui interdit de s'impliquer totalement dans le mouvement, mais ele ne le sait pas, tant est grande son excitation quand les voix masculines, toujours masculines, s'élèvent passionément, que les verres de bière s'entrechoquent, que la fumée des cigarettes monte vers le plafond, et que la culture morte se réveille brusquement. Le simple fait d'être en vie lui suffit.
Je refuse de renier ses espérances.
Il n'y a que son silence que je veuille quitter-et le silence d'Elise,
Sous le triste oignon
Rêves aveugles dans une chambre verte
attestant post mortem les leçons de Pound apprises dans des livres volés, et les poèmes auxquels Hettie imposa le silence de ses coffrets pendant trop d'années...
Je suis une femme de quarante-sept ans hantée en permanence par un sentiment d'impermanence. Si le temps ressemblait à un morceau de musique, on pourrait le rejouer jusqu'à en saisir la moindre nuance."

Joyce Johnson, Personnages secondaires, 10/18, 1994, Paris.


samedi 26 mai 2012

MICHEL FOUCAULT / Le beau danger.



"La feuille de papier pour moi c'est peut-être le corps des autres. 

(...)Pour moi, écrire, c'est bien avoir affaire à la mort des autres, mais c'est essentiellement avoir affaire aux autres en tant qu'ils sont déjà morts. Je parle en quelque sorte sur le cadavre des autres.
Je dois l'avouer, je postule un peu leur mort. Parlant d'eux, je suis dans la situation de l'anatomiste qui fait une autopsie. Avec mon écriture, je parcours le corps des autres, je l'incise, je lève les téguments et les peaux, j'essaie de découvrir les organes et, mettant à jour les organes, de faire apparaître enfin ce foyer de lésion, ce foyer de mal, ce quelque chose qui a caractérisé leur vie, leur pensée et qui, dans sa négativité, a organisé finalement tout ce qu'ils ont été. Ce coeur vénéneux des choses et des hommes, voilà au fond ce que j'ai toujours essayé de mettre à jour. 

Aussi je comprends pourquoi les gens éprouvent mon écriture comme une agression. Ils sentent qu'il y a en elle quelque chose qui les condamne à mort. En fait je suis beaucoup plus naïf que cela. Je ne les condamne pas à mort. Je suppose simplement qu'ils sont déjà morts."

Michel Foucault, Le beau danger, éditions EHESS, pages 36-37.

mercredi 23 mai 2012

MARIKEN WESSELS / Elisabeth, I want to eat.


Il y a exactement un an, je découvrais le travail de Mariken Wessels à l'occasion de sa venue au BAL, à Paris, pour la signature de deux de ses albums, dont celui-ci, réédition -bienvenue- chez Alauda Publications d'un livre auto-édité en 2008.

Photographies trouvées dans un bric-à-brac d'Amsterdam et reproduites, isolées, grossies, troublées, ou rassemblées façon planche contact- presque toutes ont pour sujet une jeune femme blonde, au visage enfantin, oscillant entre mélancolie et fous rires, malice et gravité. On devine un quotidien d'adolescente timide et affranchie, dans les années soixante-dix, du style à se prendre en photo dans le miroir... ou encore, à demi nue, à peine provocante, touchante dans ses poses de pin-up maladroite; son décor familier aussi, ses livres, son mur "labyrinthe", ses copines lors d'un gala d'école...


Qui est cette fille? A-t-elle réellement existé? On s'en fiche, tout comme on se fiche de savoir si tout est faux et truqué dans ce livre.
La fiction projetée à partir de ces photographies, celle d'une jeunesse perdue, de sa perplexité, voire sa détresse, nous suffit. Arrangées par l'artiste, retravaillées au feutre, décadrées, floues, elles nous rappellent bien sûr nos propres images, celles qui ont capturé un jeune moi défunt sans l'être tout à fait. Celui, persistant et irrémédiablement autre, qu'un "retour sur image" réactive parfois douloureusement. Des autoportraits de quelqu'un d'autre...

Elisabeth captive, dans ces clichés abimés, délibérément lésés, meurtris presque,  par les traces du temps qui a passé: poussières, scories, salissures diverses. Est-ce cela qui leur a valu d'être rapprochés de ceux de Gerard Fieret ou Miroslav Tlichy? C'est en tout cas oublier d'où parlent ces deux photographes...


Elisabeth, elle, parle peu, et gauchement. Elle est plutôt "parlée" par les autres: pour une seule lettre signée de son prénom, on en effeuille plusieurs, trop soignées, glissées entre les pages, sur papier de soie coloré. Elles disent malaise, déprime, comme des échos trop réels (Ce sont les textes de courriers, de cartes postales adressés à une fille nommée Elisabeth) des silhouettes qui ouvrent et ferment le livre de Mariken Wessels. Deux filles détournant le regard, un gars solitaire, des pavés déserts que tache un voile pâle...
 L'adolescence, quoi, en gris et blanc...

Dear Edward,

I am much better now.
I am in hospital, but i thinck
I can go out soon, maybe.
I feel very much better.
I want to see you but you
are not in Holland.
Can you comme please.
I want to see you.
I'm missing people all the
time and i miss you.
How are you.
Are you okay. The last time
i saw you it was nice and
i felt very much better.
Are you still living in Brussels.
I don't know but i liked the 
house you lived and the
streets there.
I want to eat.

                Elisabeth.

Mariken Wessels, Elisabeth, I want to eat, Alauda Publications, 2011.

dimanche 20 mai 2012

ELENI SIKELIANOS/ Le livre de Jon.



" Il importe que subsistent dans une histoire familiale des trous impossibles à remplir, des secrets et des mystères, des migrations et des invasions et des lignées troubles."
 

Affrontant l'affolant héritage d'"une personne dont les pensées tourbillonnantes ne pouvaient jamais être prédites ou dupliquées" et tout à fait consciente que cette même personne était aussi "membre d'une longue et ennuyeuse litanie de pères absents et de connards défoncés", Eleni Sikelianos livre sa version de Jon, son père terrible, d'une voix apaisée que viennent parfois mordre colère, incompréhension, tristesse- toutes légitimes.

"Mon père dispose les choses dans des ordres différents, difficiles." 

Cette différence, l'écriture va la relayer, superbement. A l'image de cette famille singulière, bohême ( des racines grecques, un grand-père poète national, des mariages multiples et des va-et-vient entre les deux continents), ce récit-patchwork aux coutures délibérément visibles, loin de "lisser" le souvenir de Jon,restitue l'image multiple d'un homme imprévisible et imprévoyant, "pas mal éparpillé dans la vie" et maladivement sensible - insupportable. Amalgame de textes de provenances diverses, le livre reste pensé en diptyque, dont la deuxième partie, "Le livre des morts" est une manière de rituel d'accompagnement vers l'autre rive, vers un ciel étoilé..."espace idéal où sont projetées nos plus belles ombres".

"J'ai passé le plus clair de ma vie à ne pas connaître les gens. Ne pas connaître mon père, mon frère, mon autre frère, ma soeur."


De ce déficit, Eleni Sikelianos ne tire aucun pathos, aucun lyrisme, préférant le désordre intime, jamais impudique, des quelques traces des moments passés avec son père.  Montage de lettres, d'extraits de conversations, de récits de rêves, jusqu'à son ébauche de scénario pour un film sans images, ou, absolument désarmants, quelques poèmes déjà publiés. Sans omettre la nécrologie en l'honneur de Jon, homme fragmenté s'il en fut.

... çà et là des clichés en noir et blanc,  tous extraits d'albums personnels... Un instantané de Jon, un chat dans les bras -"il est plein de douceur"- en miroir avec une photographie de sa fille aînée, Eleni, tenant une chèvre; un autre en jeune père voyou, affalé sur le capot d'une voiture défoncée, au fond d'un jardin, dans une posture qui justifierait à elle seule les pages 78-79 intitulées "Les fois où j'ai voulu foutre un coup de pied au cul à mon père"...

Sex & drugs & rock n' roll, sans glamour obscène: un homme talentueux qui calcine son existence, entre défonces répétées,  petits boulots, extravagances ( pêle-mêle son goût pour les armes à feu et les coatimundi!). Jon et son frère auraient été pressentis pour interpréter la musique d'Easy Rider... Cela ne s'est pas fait.
A la place (?), ce livre, publié en 2004 chez City Lights, San Francisco...



Pour répéter/ une question sans réponse/
tenter de répondre/
à la question:/ Pourquoi ferais-je un film sur Jon?

Parce que certains êtres/disparaîtront/ et
alors que restera-t-il/
d'eux?/ (pause)/ Non./Parce que/
je l'aime/ (Jon.)/



" Devant moi se tient un garçon de seize ans. Il vient juste de visiter le musée du Louvre pour la première fois de sa vie , et il a un petit morceau de toile dans sa poche- un petit poil noir du pinceau du Douanier Rousseau, avec la fine pellicule de peinture noire dessus, qu'il a prélevé sur un tableau qu'il a adoré, ne pouvant s'imaginer vivre sans. Le garçon garde ce minuscule morceau pendant des années et des années dans sa poche, le tripotant jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'une pincée de sable.

 Devant moi se tient mon père, redevenu lui-même, il a une vingtaine d'années, il est assis dans une vieille Chevrolet, et on sent sous sa peau une belle énergie qui ne connaît pas de limite. Il descend du véhicule, large d'épaules, imposant ( beaucoup plus grand qu'il ne l'était dans la vie), fort comme tout. Il s'est accidentellement cogné la tête contre la portière et c'est ce qui va le faire basculer dans la maladie et la stupeur- et alors je comprends qu'il va mourir.

 Certains jours ça me perturbe- certains jours ça  dérange chaque cellule de mon corps- que mon père soit mort loin de chez lui, maigre, toussant, dans des fringues sales, dans un motel bas de gamme, dans un triste état, un verre de jus d'orange devenu un luxe insoutenable.

 Dans la conception qu'a Dante du monde, nous ne voyons qu'un éclat de nous-mêmes ici sur Terre; le reste est spectral ou céleste, et nous hante. A moins que nous ne soyons des fantômes ici sur terre, des ombres de nos vrais moi."

Eleni Sikelianos, Le livre de Jon, traduction de Claro, mai 2012, Actes Sud.

vendredi 11 mai 2012

RESONANCES.



"Les gens ressemblent à eux-mêmes bien plus qu'on ne saurait le croire et le prévoir", écrivait Henry James à son amie Edith Wharton, le 9 décembre 1909. (Lettres, Seuil, Paris)


Photographie anonyme - un "faux" D.H.Lawrence?...



vendredi 4 mai 2012

DIDIER ERIBON / Retours sur "Retour à Reims".



"Comment penser les inégalités et les mécanismes de la domination, comment lutter contre eux, comment penser la démocratie effective, comment se battre chaque jour pour élargir l'espace démocratique, quel est le rôle des mouvements sociaux, des associations, la place des partis politiques, et aussi, bien sûr, le travail des intellectuels et des chercheurs dans ces processus, des analyses qu'ils peuvent produire, etc..."

"Ce qui me semble important, c'est ce que le vote permet d'exprimer, quel rapport de force il peut permettre d'instaurer à un moment ou à un autre. On ne se reconnaît jamais totalement dans le parti ou le candidat pour lequel on vote. On n'adhère jamais au programme dans son ensemble. Voter, c'est faire un geste situé. Il me semble avant tout nécessaire, par conséquent, de penser l'acte qu'est le vote comme toujours articulé aux autres dimensions de la politique, celles qu'incarnent les mouvements sociaux, les associations, les mobilisations, durables ou éphémères. En se demandant: qui, dans telle ou telle configuration, représente le mieux ce qui bouge dans la société."


Didier Eribon, Retours sur "Retour à Reims", Editions Cartouche, janvier 2012.